(1930 - 1973)
Maronite, originaire du village de Batha (Kesrouan, Liban), Michel El mir (Hénin Liétard 1930-Beyrouth 1973) était le fils d’un médecin qui s’était installé en France. Il revint au Liban, avec sa famille, à l'âge de douze ans. Un fond d’esprit de rupture et de refus social lui fit quitter la maison familiale, quand son père lui déclara que peindre n’était pas une profession honorable. Il partit s’installer à Damas, où il vécut quelques années et, tout en travaillant chez un disquaire pour gagner sa vie, fit deux expositions au début des années cinquante.
D’un tempérament ouvert, il était animé d’une vitalité généreuse, qu’entretenait l’amour de son métier. Sa peinture se caractérise par le travail de la pâte picturale, ainsi que par une manière rapide d’aller à la toile. Elle ne manque pas d’intérêt, si on la compare à une peinture libanaise précautionneuse, qui à cette époque hésitait entre l’abstrait et le figuratif. Elmir faisait un figuratif construit par instinct et vivement coloré, dans une sorte de jouissance de la peinture immédiate, gérée pour couvrir la toile, sur laquelle quelques signes venaient rappeler le sujet et préciser le motif.
Ses repères relevaient, dans l’inconscient culturel, d’une situation fondamentale : Maronite et Francophone, le tout tempéré toutefois par des études au Collège des Frères de Gemayzé. Les années passées à Damas lui firent reposer le problème de la figuration et de la modernité au Liban.
Sa peinture s’élaborait, en effet, à un moment très important, sous des influences auxquelles il n’était guère possible d’échapper, mais le terrain était dégagé dès lors qu’on les assimilait toutes d’un seul coup. La prise de conscience de l’autonomie de la toile donnait aux peintres un nouveau statut personnel, qui n’était pas la liberté sans motif, mais la liberté hors du motif et de la commande. Chez Elmir, cela se traduisait par un sensualisme, un désir de réponse plastique immédiate, qu’il ne pouvait satisfaire que par un étal direct de la couleur sur la toile.
Dans sa période damascène, l’enseignement de Gemayel fut surmonté par une exploration et une construction plus inquiètes de la toile. Dans les années soixante, il construisit un classicisme sensualiste sans lourdeur, où le plaisir de l’œil s’allége, malgré l’évident désir de continuer à marquer, dans la chair de la toile, l’interrogation inquiète du peintre.