Concept d'Art - Evolution et pratique
Des langages traditionnels aux nouveaux médias, par Nicole Malhamé Harfouche
S’il est effectivement vrai qu'il y a dans l’art, aussi bien que dans la vie, deux approches fondamentales: l’identification et la communication, à travers des langages plastiques il est, alors, nécessaire, sinon urgent, de s’intéresser, aujourd’hui, à la particularité de l’art vidéo, de l’art numérique sur ordinateur et à tous les nouveaux médias.
En effet, de nombreux artistes plasticiens libanais ont recours, depuis quelques années, à l’art intégrant les nouvelles technologies: multimédias, vidéo, art digital, art numérique… Rompant avec les processus de fabrication traditionnelle de l’image, délaissant les pinceaux et la palette, ils utilisent les moyens techniques et technologiques de leur temps, à savoir: l’ordinateur, la souris, la palette électronique et les générateurs de codes informatiques…
Pourtant, à travers leur production, à l’instar de leurs prédécesseurs, (tous les artistes d’avant-garde et chefs de file, dans le monde), ils soulèvent des problèmes que la créativité a toujours posés, dans un langage plastique qui leur est propre, le langage de leur temps. C’est la question de la place de l’art, dans la vie d’aujourd’hui, qu’ils posent, celle, précisément, de tous les langages visuels innovateurs. Ils nous invitent, à l’ère du numérique, à reformuler la question de l’expérience esthétique et des critères de jugement de goût, non plus en termes de beau, mais en termes de plasticité, d’interactivité, d’ubiquité, de connectivité, d’immersion, de commutativité… Bien sûr, ils sont, très souvent, incompris par le grand public, lequel, dans tous les pays du globe, même les plus développés demeure, par rapport à l’évolution des langages plastiques, comme une horloge qui retarde.
L’expérience innovatrice se substitue aux langages traditionnels
Or, dans ces diverses formes de création, l’image ne doit pas, seulement, être considérée comme un objet sur lequel le regard se pose mais, aussi et surtout, comme quelque chose qui réfléchit le regard et le retourne vers celui qui le porte. Cette réflexion immédiate de l’image oblige, d’ailleurs, le regardeur à essayer de saisir, à travers l’écran, le message de l’image virtuelle à sa source. Ici, c’est donc l’expérience innovatrice, au moyen des nouvelles technologies, qui se substitue aux langages traditionnels: peinture, gravure, sérigraphie, lithographie. Et ce, pour mieux marquer le vécu actuel et le temps, présent et à la fois réel, des expériences d’avant-garde. D’ailleurs, jamais l’art, avec un grand “A”, n’a semblé aussi proche du spectateur, que celui sur le “Net”, interactif ou pas, prenant l’Internet pour médium. Ce genre d’art repose, essentiellement, sur la participation du spectateur qui est, souvent, invité à intervenir personnellement et à faire évoluer l’œuvre. En conclusion, l’art électronique ou numérique, interactif ou non, “off line” ou “on line”, propose au regardeur de faire l’expérience d’une nouvelle sorte d’esthétique, dans la mesure où la création artistique est, dans ce cas précis, un processus en perpétuelle mutation.
Par conséquent, la situation des jeunes plasticiens libanais, qui ont recours aux langages intégrant les nouvelles technologies est, tout autant, celle de créateurs que celle d’initiateurs. Ceux là initient une certaine logique qui finira, tôt ou tard, par s’imposer après un temps plus ou moins court ou long. Peut être, beaucoup plus rapidement qu’on le pense, étant donné que le monde d’aujourd’hui est immergé dans les nouvelles technologies.
"La Revue du Liban" N° 4061 Du 8 Au 15 Juillet 2006, Nicole Malhamé Harfouche